Une gestion du bien organisé.
Le démembrement de propriété ne
constitue pas une indivision. Usufruitier et nu-propriétaire sont détenteurs de
droits superposés et non pas concurrents. A cet égard, la gestion du
démembrement obéit à des règles autonomes et particulières. En règle générale,
le démembrement de propriété s’applique à tous types de biens susceptibles de
constituer un patrimoine : immeuble, mobilier, véhicule mais peut prendre en compte la gestion de
dettes grevant éventuellement ces biens. A ce titre, il est opportun de
déterminer qui du nu-propriétaire ou de l’usufruitier en supporte la charge.
Si la dette est existante lors de
la création du démembrement, l’usufruitier doit en supporter les intérêts, le
capital restant à la charge du nu-propriétaire. Si l’usufruitier veut avancer
la somme nécessaire au paiement de la dette, le nu-propriétaire lui en
restituera le capital à la fin de l’usufruit sans aucun intérêt. Il paie alors
le capital pour le compte du nu-propriétaire qui doit lui en tenir compte en
fin d’usufruit à l’occasion des opérations de compte.
Si par contre l’usufruitier ne
veut pas faire l’avance du passif, deux possibilités s’offrent au
nu-propriétaire : soit il choisit de payer la dette et dans ce cas
l’usufruitier lui doit à compter du règlement effectué des intérêts, soit il
choisit de ne pas faire l’avance et provoquer la vente à due concurrence du
passif pour acquitter la dette. Le prix de la vente est alors affecté au
paiement de la dette.
A noter cependant que ces règles civiles sont
totalement indépendantes du droit fiscal. De ce point de vue, seul le capital
restant dû au jour du décès constitue un passif successoral déductible ;
les intérêts qui sont dus à compter du décès ne sont jamais déduits. Seuls les
intérêts échus au décès et non réglés peuvent l’être !!
Concernant la dette apparaissant
durant l’usufruit, le code civil règlemente la répartition des charges entre l’usufruitier
et le nu-propriétaire sur la base d’une distinction entre les charges ordinaires et les charges extraordinaires.
L’usufruitier doit supporter
entièrement les charges ordinaires définies comme toutes les charges annuelles de
l’héritage, telles que les contributions et autres qui dans l’usage sont
censées charges de fruits ».
Quant aux charges
extraordinaires, le nu-propriétaire doit les payer tandis que l’usufruitier
doit lui verser pendant la durée de l’usufruit les intérêts du capital ainsi
dépensé. Si l’usufruitier devant l’inaction du nu-propriétaire décide
d’acquitter des charges extraordinaires, il
pourra recouvrer le montant de la dépense contre le nu-propriétaire à la fin de
l’usufruit.
Le caractère annuel de ces
charges permet de les considérer comme ordinaires. Cela conduit à admettre que
sont des charges ordinaires toutes les charges périodiques affectant les biens
soumis à l’usufruit quelle que soit la périodicité même si elle n’est pas
régulière! Ainsi en est-il des intérêts d’emprunt, les charges fiscales (impôts
locaux pesant sur le bien soumis à usufruit, taxe d’habitation qui pèse sur
l’occupant des lieux si l’usufruitier habite lui-même l’immeuble ; les
taxes foncières parce qu’il s’agit d’une contribution annuelle).
Les parties peuvent par ailleurs convenir
d’une modalité de répartition différente en prévoyant expressément par exemple
que la taxe foncière sera remboursée par le nu-propriétaire à l’usufruitier.
L’usufruit de l’immeuble.
L’usufruitier auquel sont
affectés les fruits et revenus du bien démembré est investi des pouvoirs d’administration et de gestion de l’immeuble.
A ce titre, le code civil organise une
répartition des pouvoirs de l’usufruitier et du nu-propriétaire pour la
conclusion et le renouvellement des baux en effectuant une distinction selon
leur nature et leur durée. Il reste toujours possible de déroger aux règles
légales en prévoyant une répartition différente des prérogatives dans l’acte
constitutif du démembrement ou dans une convention postérieure.
L’article 10 de la loi du 6 Juillet 1989 prévoit une durée au moins égale à trois ans
pour le bail d’habitation conclu par un bailleur personne physique.
L’usufruitier est donc habilité à signer un bail d’habitation dans la mesure où la durée prévue n’excède pas neuf années.
Ses prérogatives sont celles d’un bailleur classique. A ce titre, il peut
donner congé au locataire, exercer un droit de reprise, agir judiciairement en
résiliation de bail. En revanche, la délivrance d’un congé pour vendre
constitue un acte de disposition subordonné à l’intervention du
nu-propriétaire.
Le code civil organise comme nous l’avons vu plus haut la répartition
des charges en distinguant les réparations d’entretien des « grosses
réparations ». Les grosses réparations sont celles des gros murs et des
voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières, celui des
digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. »
Cette liste est limitative mais
malaisée à apprécié par la jurisprudence. Celle-ci se fonde essentiellement sur
le critère matériel (importance des travaux) et financier (caractère
exceptionnel de la dépense) pour définir le caractère de grosses réparations
(telles que la réfection de souches de cheminées ou la remise en état des
zingueries).
L’obligation essentielle de
l’usufruitier consiste au final à
entretenir l’immeuble. A ce titre, le nu-propriétaire peut contraindre
l’usufruitier à l’exécution des travaux à sa charge. Le juge peut alors
condamner l’usufruitier sous astreinte voire prononcer la déchéance de
l’usufruit. A l’inverse le nu-propriétaire ne peut pas être mis dans
l’obligation d’effectuer les travaux lui incombant.
Toutes ces dispositions ne sont
pas d’ordre public, il est donc judicieux d’y déroger dans l’acte constitutif
de démembrement.
Le nu-propriétaire exonéré d’ISF.
L’impôt de solidarité sur la
fortune (ISF) est dû par toute personne physique domiciliée en France et
propriétaire au 1er janvier de l’année d’imposition d’un patrimoine
imposable d’une valeur nette supérieure au seuil d’imposition en vigueur à
cette même date (790 000€ au 1er
Janvier 2009). Au cas de détention de droits démembrés s’appliquent des
règles particulières.
Pour l’ISF, les biens grevés d’usufruit doivent être compris dans le
patrimoine de l’usufruitier pour leur valeur en toute propriété
c’est-à-dire pour la valeur de l’usufruit et de la nue-propriété réunis
(Article 885 CGI).Si l’usufruit ne porte que sur une fraction du bien,
l’usufruitier ne doit inclure dans son patrimoine pour l’ISF que la même
fraction de la toute propriété. En
contrepartie, le nu-propriétaire n’a rien à déclarer au titre de l’ISF.
Un régime fiscal attractif.
Au regard des revenus fonciers, l’usufruitier auquel sont affectés les
fruits et revenus du bien est seul imposable à raison du loyer perçu. De là
en découle le régime du déficit foncier et la possibilité de déduire de ses
loyers ses intérêts d’emprunt comme ses
dépenses d’entretien à condition de ne reporter sur son revenu d’activité un
déficit généré par ces dernières plafonné à 10700€.
Concernant le nu-propriétaire, au
cas où il engage des dépenses de grosses réparations, il peut les imputer sur
ses autres revenus fonciers si et seulement si le bien est loué (et non occupé par l’usufruitier). A défaut de
revenus fonciers, le déficit foncier généré est imputable sur le revenu global sans limitation à condition que le
démembrement provienne d’une succession ou d’une donation consentie entre
parents et qu’il concerne que des dépenses de grosses réparations. Dans les
autres cas, le report sera limité à
10700€ (incluant les intérêts d’emprunt).
Le régime de l’exonération des plus-values immobilière applicable.
Concernant les plus-values
immobilières, la loi de finance pour 2004 en a réformé le régime d’imposition.
Divers paramètres doivent être appréhendés pour liquider l’impôt : le prix
de revient ou d’acquisition ; le prix de vente et la durée de détention.
Le prix de revient est constitué
par la valeur du droit cédé déterminé selon le barème de l’article 669 CGI
d’après l’âge de l’usufruitier au jour de la cession ou le prix payé par le
cédant le jour de l’acquisition du droit. Le second terme du calcul conduit à
retenir la valeur du droit cédé au jour de la cession.
Conclusion : un régime applicable à tous types de patrimoines !
Ce qu’il convient de retenir au final
est la nécessité de démembrer une partie de son patrimoine dans le but soit de
le valoriser (une vente d’usufruit par exemple) soit de mieux le gérer tel que l’usufruit
d’un panier d’actions confié à une société de gestion ou d’un ensemble
d’appartements géré par une société immobilière soit de le transmettre par une
donation à ses enfants avec une clause de réserve d’usufruit. Bref, une
véritable stratégie !
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